“Apprendre ne doit pas être une option !”

“Apprendre ne doit pas être une option !”

La poursuite d’étude et l’insertion professionnelle des jeunes en situation de handicap de plus de 16 ans, est une préoccupation majeure. Créée en 2001, l’association Droit au savoir défend ces causes. Nous avons rencontré Marie-Pierre Toubhans, coordinatrice générale, pour qu’elle nous dresse un état des lieux.

Vers plus d’égalité des chances

Promouvoir et soutenir la scolarisation au-delà de 16 ans, ainsi que la formation professionnelle des jeunes en situation de handicap, c’est le rôle de Droit au savoir, collectif inter associatif, inter handicap de 32 organisations.

Pourquoi 16 ans ? Parce que c’est l’âge à laquelle la scolarité ne devient plus obligatoire et que cela a des conséquences sur les parcours des jeunes, en particulier pour ceux qui sont en situation de handicap.

Droit au Savoir informe les jeunes, ainsi que leur famille, et formule des propositions concrètes basées sur des remontées de terrain. Régulièrement, des notes thématiques sont rédigées dans une logique de co-élaboration avec les pouvoirs publics.

« Nous prenons le problème dans sa globalité, qu’il soit scolaire, universitaire, qu’il touche à la formation professionnelle, l’orientation les examens, l’accès au logement, l’aide au travail personnel à domicile, la culture, le transport. » explique Marie-Pierre Toubhans.

Ces fiches sont des outils pour faire bouger les lignes en faveur d’une société inclusive.

«Par exemple, nous avions proposé dans la loi de juillet 2013 sur l’enseignement supérieur, que chaque conseil d’administration d’université adopte un schéma directeur pluriannuel de la politique du handicap ».

C’est chose faite et cela a un impact direct sur la prise en compte transversale du handicap : pour les étudiants, les personnels, la recherche, l’accessibilité !

“Un des enjeux actuels réside dans la nécessité que les dispositifs de droit commun prennent en compte dès le départ les besoins des élèves et étudiants en situation de handicap ; plutôt que de recréer du spécifique sur du droit commun.

Le handicap c’est l’affaire de tous : des responsables de la culture, de la vie étudiante, des associations, du numérique !

C’est cela l’enjeu des schémas directeurs pluriannuels. Ce sont des vecteurs de prise en compte globale des besoins et des attentes des personnes en situation de handicap, ils définissent des objectifs communs à l’échelle d’un établissement favorisant l’accessibilité, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap.”

ParcourSup vs Post Bac : des changements ?

 «Dans la même logique nous avons travaillé en partenariat avec le Ministère pour faire évoluer la plateforme ParcourSup » complète Marie-Pierre Toubhans.

La loi Orientation et Réussite des Etudiants du 8 mars 2018, a amené son lot d’évolutions pour tous les candidats. Des spécificités pour ceux en situation de handicap ont été introduites, comme le droit au réexamen de son dossier en fonction de sa situation individuelle et de ses besoins spécifiques (problématique de transports, d’accompagnements, de soins, d’accessibilité).

“Le droit au réexamen existe pour différents publics dont les candidats en situation de handicap. Il a pour objectif de répondre aux problématiques particulières que peuvent rencontrer les candidats en situation de handicap, telles que le besoin d’accompagnement, de compensation, de soins, de transports…

Il concerne les candidats qui ont été accepté dans une formation mais dont les conditions d’accueil ne permettent pas leur inscription, ceux qui ont connu un changement de situation après la date des vœux, ceux qui ont été refusé dans toutes les formations.”

Tout comme l’était Admission PostBac, ParcourSup reste une plateforme de recueil de vœux et d’affectation, mais dorénavant pour qu’un établissement y soit référencé il doit indiquer le contact d’un référent handicap. Cette information est une victoire pour Droit au savoir. En effet, Marie-Pierre Toubhans développe 

« Pour la version 2019, nous avons participé à la réflexion pour faire évoluer l’outil : chaque formation indique désormais le contact d’un référent handicap au même titre que d’autres informations. C’est très important, car utile aux jeunes et à leur famille pour prendre contact, affiner ses choix, mais aussi pour anticiper leur accès à l’enseignement supérieur. »

Second outil : la fiche « liaison » entre le secondaire et l’enseignement supérieur. Facultative, elle est fortement recommandée. Ce document, téléchargeable sur ParcourSup, constitue la rubrique « handicap/besoins spécifiques » dans le profil du candidat et fait partie de données que les candidats peuvent remplir s’ils le souhaitent et ne concerne que les élèves en situation de handicap.

Cet outil donne de précieuses informations tels que le parcours dans le secondaire, les besoins en termes d’accompagnement, de restauration, de logement, de transport etc.

La fiche « liaison » sera transmise à l’établissement une fois que l’étudiant est admis pour lui permettre d’être accueilli dans les meilleures conditions.

En effet, « Afin d’éviter toute crainte de discrimination, ces éléments ne sont pas accessibles aux personnes qui étudient les dossiers en premier lieu. La fiche de liaison est transmise à la Commission d’Accès à l’Enseignement Supérieur, qui a en charge des demandes de réexamen (mais n’est pas un préalable à un éventuel réexamen), et au référent, une fois l’affectation acquise, si l’étudiant le souhaite.» précise Marie-Pierre Toubhans.

Des améliorations sur un parcours encore difficile

Le nombre d’étudiants en situation de handicap augmente de près de 14% par an : les enfants « de la loi 2005 » arrivent aujourd’hui dans l’enseignement supérieur.

Cette loi donne l’accès en priorité à une scolarisation dans l’ordinaire.

Toutefois le nombre d’étudiants en situation de handicap reste faible : 28 000 en formation universitaire contre 350 000 élèves dans le primaire et le secondaire.

« On travaille pour éviter des ruptures de parcours liées à la barrière institutionnelle, au statut (Ndlr : un apprenti n’a pas les mêmes droits que les scolaires), à l’âge (les dispositifs médico-sociaux s’arrêtent à 20 ans). La marge de progression reste phénoménale » conclu Marie-Pierre Toubhans.

Le profil des étudiants change. Après l’arrivée massive de jeunes avec des troubles dys, ce sont maintenant des étudiants avec des situations complexes ou des troubles du spectre de l’autisme qui entrent à l’université.  L’accessibilité totale est encore lointaine même si les efforts sont là et les Missions Handicap des universités et les référents Handicap des écoles contribuent à cette évolution.

Certains aménagements restent difficiles à mettre en place pour des raisons matérielles, mais aussi de sensibilisation et de formation des personnels.

En 2019 débute une étude qui donnera une vision précise de la transition postbac.

« Sous l’impulsion de notre comité scientifique, une enquête travail suivra une cohorte de lycéennes et lycéens de terminale, en situation de handicap, sur les 3 années de licence ».

Handicap ou non, un parcours postbac, ça se prépare !

« ParcourSup est la conclusion d’un travail fait en amont. Et nous sommes déjà début février ! » alerte Marie-Pierre Toubhans.

On l’aura compris, il n’y a plus de temps à perdre et tous les outils mis à disposition sont bons à prendre :

  • Contactez les référents pour un premier contact avec l’établissement, pour se faire connaître, anticiper les éventuels besoins.
  • Allez aux portes-ouvertes : regarder sur un site web et aller sur le campus est bien différent. Cela peut aider pour « tester » son accessibilité.
  • Certains établissements proposent des initiatives spécifiques aux candidats en situation de handicap, comme la possibilité de passer une journée chez eux.
  • Utilisez le formulaire de contact sur ParcourSup, la ligne téléphonique pour poser des questions.
  • Utilisez les ressources des CIO, des réseaux associatifs.
  • Participez aux tchats.
  • Faites très attention aux dates ; ne vous y prenez pas au dernier moment.

Parler de son handicap, d’accord, mais quand ?

«Il n’y a jamais de bon moment, car chaque situation est personnelle. La bonne réponse est forcément celle que l’on choisit (..) Il faut avoir confiance en soi, en parler et partager ses difficultés.» ; c’est la philosophie de Marie-Pierre Toubhans.

Vous trouverez de précieux conseils sur le site de Droit au Savoir.

Save the date!

Rendez-vous le 15 février de 15 à 16:00 sur le site de l’ONISEP pour un tchat spécifique pour les candidats en situation de handicap. Posez déjà vos questions sur : http://www.onisep.fr/Tchats

Il sera organisé par Droit au Savoir et l’Onisep, en partenariat avec la Fondation MMA.

Jérôme Teillard, chef de projet “Réforme de l’accès à l’enseignement supérieur” et conseiller auprès de la Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, répondra en direct aux questions. Nous y serons également présents pour échanger avec vous.